Génocide au Rwanda : un non-lieu requis contre l’armée française, accusée d’avoir abandonné des centaines de Tutsi

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Les cinq officiers généraux de l’opération « Turquoise » n’ayant pas été mis en examen, la décision finale revient aux juges d’instruction, qui devraient ordonner un non-lieu.

Le parquet de Paris a requis un non-lieu général dans l’enquête sur l’inaction reprochée à l’armée française lors des massacres de Bisesero à la fin de juin 1994, pendant le génocide des Tutsi au Rwanda, a appris lundi l’Agence France-Presse (AFP) de sources proches du dossier.

La décision finale revient désormais aux juges d’instruction.

Les cinq officiers généraux de l’opération « Turquoise » visés par l’enquête n’ayant pas été mis en examen, les magistrats devraient logiquement ordonner un non-lieu, à moins qu’ils décident de relancer les investigations, comme réclamé récemment par des associations et des rescapés après la publication du rapport Duclert sur le rôle de la France au Rwanda.

Le parquet de Paris a considéré que n’a été « établie aucune aide ou assistance des forces militaires françaises lors de la commission d’exactions, aucune adhésion de ces dernières au projet criminel poursuivi par les forces génocidaires ni aucune abstention d’intervenir face à des crimes constitutifs d’un génocide ou de crimes contre l’humanité en vertu d’un accord antérieur », a expliqué le procureur de la République de Paris, Rémy Heitz, dans un communiqué.

Au terme de ses réquisitions de 386 pages, dont l’AFP a eu connaissance, le parquet n’écarte pas la possibilité que la non-intervention des militaires soient constitutives d’une « non-assistance à personne en péril », mais conclut que cet éventuel délit est quoi qu’il en soit prescrit.

« Déni de justice »

« Ce réquisitoire est navrant et affligeant juridiquement », a déclaré Eric Plouvier, l’avocat de Survie, dénonçant « un déni de justice ».

Depuis 2005, les associations Survie, Ibuka, FIDH et six rescapés de Bisesero accusent la force Turquoise, déployée au Rwanda sous mandat de l’Organisation des Nations unies (ONU) pour faire cesser les massacres, d’avoir sciemment abandonné aux génocidaires pendant trois jours des centaines de Tutsi réfugiés dans les collines de Bisesero, dans l’ouest du pays. Selon l’ONU, les massacres ont fait plus de 800 000 morts entre avril et juillet 1994, essentiellement au sein de la minorité tutsi.

Pendant l’instruction, cinq hauts-gradés français – dont le chef de l’opération « Turquoise », le général Jean-Claude Lafourcade – ont été entendus par les juges et sont restés placés sous le statut de témoin assisté, moins incriminant que celui de mis en examen, qui ouvre, lui, la voie à un éventuel procès. Un choix contesté par les parties civiles, qui réclament un procès en « complicité de génocide » contre ces officiers, mais aussi contre l’entourage, jamais visé par l’enquête, de l’ancien président François Mitterrand.

Pour les plaignants, le rapport publié en mars par la commission présidée par l’historien Vincent Duclert, sur la politique française au Rwanda entre 1990 et 1994, a révélé « des charges nouvelles » qui justifient de relancer l’enquête et d’auditionner enfin des hauts responsables de l’Elysée de l’époque.

LeMonde

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