RDC: Minembwe, l’arbre qui cache la forêt

ONU - MINEMBWE

Minembwe, serait finalement devenue la commune de la peur et de la discorde ! C’est le moins que l’on puisse dire. Car, si dans le Sud-Kivu où se trouve Minembwe, la population a froidement accueilli l’arrivée du nouveau bourgmestre qui, pour plusieurs raisons, pourrait être l’œil du Rwanda, à Kinshasa, c’est le tollé général. Plusieurs personnalités ont donné de la voix, en redoutant que l’installation du bourgmestre de la commune rurale de Minembwe matérialise un plan obscur de la balkanisation de la RDC. Avec l’instabilité qui caractérise la partie Est du Congo depuis plusieurs décennies, l’instauration de cette commune va-t-elle réellement dans le sens de rechercher la paix ? Et qu’est-ce qui fait que d’autres communes créées au même moment que Minembwe, par décret du Premier ministre en 2013 sous Kabila, n’ont pas encore des bourgmestres ? Quelle est l’urgence pour Minembwe ? Autant d’interrogations, dans l’opinion nationale, qui attendent d’être éclairées.

Le lundi 28 septembre 2020, sur instruction du ministre de la Décentralisation et Réformes institutionnelles, le ministre provincial de l’Intérieur de la province du Sud-Kivu avait procédé à l’installation du bourgmestre de la commune rurale de Minembwe, en territoire de Fizi, M. Gad Mukiza de la communauté Banyamulenge. Son adjoint, qui est de la communauté Mubembe, n’était pas présent à la cérémonie.

C’était en présence d’une forte délégation, composée essentiellement par le ministre de la Défense et des Anciens combattants, Aimé Ngoy Mukena, le ministre d’État en charge de la Décentralisation et Réformes institutionnelles, Azarias Ruberwa, du chef d’État-major général des FARDC, le général Célestin Mbala, du gouverneur du Sud-Kivu, Théo Ngwabidje, ainsi que des députés nationaux parmi lesquels des membres de la commission Défense et Sécurité de l’Assemblée nationale.

Pour le gouverneur du Sud-Kivu, cette nouvelle étape permettra notamment d’accélérer le processus de paix dans la région.

Un avis que ne partage pas complètement le député national Juvénal Munubo, élu de Walikale au Nord-Kivu : « Pour la paix à Minembwe, je pense que les solutions sont : le renforcement de la présence et de la capacité des FARDC ; un dialogue intercommunautaire entre les banyamulenge, les babembe, les bafuliro et le banyindu et une diplomatie parlementaire sous régionale CEPGL ».

Pourquoi une installation « singulière » ?

À ce sujet, un autre député, Muhindo Nzangi Butondo, est passé à la vitesse supérieure. Il a initié une interpellation à l’Assemblée nationale à l’endroit du ministre d’État, ministre de la Décentralisation et Réformes institutionnelles, Azarias Ruberwa pour avoir, selon lui, profité de son autorité afin d’imposer l’installation « singulière » de la commune rurale de Minembwe.

L’élu du Nord-Kivu rappelle que pendant la période d’occupation de l’Est du territoire national par des troupes étrangères, l’actuel ministre d’État, ministre de la Décentralisation et Réformes institutionnelles était à la tête du Mouvement Rassemblement des Congolais Démocrates (RCD). La branche politique des forces étrangères avait créé le territoire de Minembwe, incluant plusieurs entités des territoires de Fizi, Mwenga et Uvira. Après la réunification du pays, sous pression de la population locale, le territoire s’est auto-dissout.

Ainsi, selon lui, l’acte posé est susceptible d’envenimer les relations entre les Congolais et raviver les suspicions d’un déclenchement du processus de balkanisation de cette partie du pays.

Fayulu appelle les Congolais à s’y opposer

Pour le candidat malheureux à la dernière présidentielle, il s’agit d’une « initiative téméraire » qui est, dit-il, « une sérieuse menace à l’intégrité territoriale de la RDC ». Ainsi, il invite « le peuple congolais à la vigilance de manière à faire échec à ce plan de balkanisation du pays ». « Je demande aux congolais de s’opposer à l’instauration de Minembwe en commune rurale », dit-il.

De son côté, le député national, Delly Sesanga, estime que l’installation des communes rurales de Minembwe ou autre est un détournement de la loi et une corruption des règles. « Le gouvernement à la suite du Sénat avaient relevé la violation de la loi dans la création de ces communes. J’ai dirigé les travaux sur la loi sur des ETD: rien ne le justifie », a-t-il réagi.

Du côté du gouvernement, on estime que le ministre de la Décentralisation est compétent pour tout ce qui touche aux Entités territoriales décentralisées (ETD).

Face au tollé, le Porte-parole du gouvernement, Jolino Makelele, s’est exprimé en ces termes : « Une commune n’est pas de notre fait. Nous avons trouvé un projet déjà en place. On n’a fait que finaliser ce qui avait déjà été décidé depuis, je crois, 2013… Personne ne peut accuser Félix Tshisekedi d’être à la solde des Rwandais ou être en train de subir un diktat quelconque de qui que ce soit ou de quelques communautés que ce soit ».

Hasard de calendrier !

En ce qui concerne la présence massive des autorités tant politiques que militaires et même diplomatiques, le porte-parole du gouvernement estime que « c’est un hasard de calendrier ».

Pour lui, « il y avait un projet de tournée de hauts responsables politiques accompagnés des élus locaux et des responsables de l’Armée pour aller sensibiliser la population sur tous les efforts fournis par le gouvernement pour mettre fin à la guerre et l’inviter à ne pas adhérer aux thèses sécessionnistes ». Affaire à suivre.

Le Potentiel

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