Comment Facebook est utilisé pour traquer et tuer des « gangsters » au Kenya

Un escadron soupçonné d’être lié à la police kényane utilise Facebook pour identifier et tuer des jeunes accusés d’être membres de bandes de malfaiteurs, ont soutenu, lors d’un forum à Nairobi, des résidents d’un quartier pauvre et surpeuplé de la capitale kényane.

« J’ai perdu deux maris en un an », a déclaré le mois dernier une jeune femme en larmes, lors d’un forum ouvert au public, dans le quartier de Kayole, sous l’égide du ministère public.

D’autres ont pris la parole pour raconter des histoires similaires, sur la perte de leurs proches dont l’âge varie pour la plupart entre 15 et 24 ans.




Le procureur de la République, des hauts responsables de la police et des militants des droits de l’homme présents à la rencontre ont écouté des intervenants raconter comment leurs proches ont été fichés par des « chasseurs de gangsters », à travers Facebook.

On donne des indices sur le réseau social pour les identifier, et « au bout d’une semaine ou d’un mois, ils sont fusillés et des photos des cadavres sont publiées sur Facebook », a déclaré lors du forum un responsable du Centre de justice communautaire de Dandora (une banlieue située dans l’est de Nairobi), Wilfred Olal.

Les photos publiées montrent quelquefois, en gros plan, des têtes fendues par des balles, avec des messages indiquant que le même sort attend d’autres « gangsters ».

Les larmes de la police

Duncan Omanga, chercheur à l’Université Moi au Kenya, qui surveille les pages Facebook des « chasseurs de gangsters » depuis trois ans, affirme que des policiers présumés espionnent leurs cibles, sous couvert de l’anonymat.

« Le premier compte Facebook non officiel de la police est apparu sous le nom de Hessy wa Kayole. Hessy est devenu un obscur chasseur de criminels », explique Duncan Omanga.

Selon M. Omanga, donner l’impression d’une « omniprésence de la police et d’une surveillance étatique » dans certains quartiers de Nairobi semble être une stratégie.




« La personne derrière les comptes Facebook n’est pas un policier, mais un civil passionné de questions de sécurité », a précisé en novembre dernier l’ancien chef de la police kényane, Joseph Boinnet.

« Fixer le rendez-vous d’un terroriste avec Dieu… »

Et le directeur des enquêtes criminelles de la police, George Kinoti, qui a fondu en larmes en écoutant certains témoignages à Kayole, déclare ne rien savoir de « Hessy » et des autres « chasseurs de gangsters ».

« Avec moi, personne ne va couvrir un policier tueur », jure-t-il.

Selon certains témoignages donnés lors de la réunion de Kayole, les « chasseurs de gangsters » seraient également « sur Twitter ».

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