Malgré les sanctions américaines, Kabila et son entourage décrochent l’immunité diplomatique
Alors qu’il a criblé de sanctions l’entourage proche de Joseph Kabila, le département d’Etat américain a soufflé le chaud et le froid sur une procédure judiciaire qui vise personnellement l’ex-chef de l’Etat congolais.
C’est une épée de Damoclès suspendue depuis 2018 sur la tête de l’ex-président congolais et qui pourrait lui coûter plus de 500 000 dollars. L’affaire vient de connaître un nouveau rebondissement avec une décision fin juin du juge fédéral Amy Berman Jackson, membre de la cour du District de Columbia, qui a décidé d’accorder l’immunité diplomatique à Joseph Kabila et à cinq membres de son entourage.
Si elle a aussitôt été contestée en appel, cette décision offre un répit à l’ancien président et ses proches. Deux ans plus tôt, la justice américaine les avait reconnus responsables d’avoir roué de coups trois Congolais de la diaspora, qui avaient manifesté en 2014 devant l’hôtel Capella de Georgetown, à Washington, où séjournaient Joseph Kabila et sa suite. Les inculpés avaient alors été condamnés, solidairement avec l’Etat congolais, à verser 562 000 $ aux trois plaignants au titre de dommages et intérêts.
Désormais protégés par l’immunité diplomatique, les six hommes peuvent voyager sans crainte sur le sol américain. Outre Joseph Kabila, cette immunité concerne plusieurs piliers de la Kabilie. C’est le cas notamment de Raymond Tshibanda, ex-ministre des affaires étrangères et actuel membre du comité de suivi de l’accord entre le Front commun pour le Congo (FCC) et Cap pour le changement (Cash), de Jean-Marie Kassamba, communicant informel du pouvoir kabiliste et influent patron de la chaîne de télévision Télé 50, ainsi que de Séraphin Ngwej, ambassadeur itinérant sous la présidence de Kabila et l’un de ses proches conseillers.
Pour faire valoir leur immunité, l’Etat congolais s’est appuyé sur son ambassadeur à Washington, François Nkuna Balumuene, nommé par Joseph Kabila en 2014 et toujours en poste sous la présidence de Félix Tshisekedi. Kinshasa a également fait appel aux services de cinq avocats du cabinet américain Arnold & Porter pour plaider l’immunité.
Compte tenu du statut de Joseph Kabila et de ses proches, le juge fédéral Amy Berman Jackson avait au préalable sollicité l’expertise du département d’Etat américain. Celui-ci, après plusieurs mois d’atermoiements, avait conclu que les officiels congolais ne pouvaient se prévaloir de l’immunité au sens du Diplomatic Relations Act.
En revanche, il avait laissé le soin à la cour du District de Columbia d’interpréter leur immunité au regard de la jurisprudence américaine. C’est en vertu de celle-ci que le juge Amy Berman Jackson a finalement donné raison à la partie congolaise. Le magistrat reprend notamment à son compte l’un des arguments de la défense, qui souligne que le passage à tabac des manifestants ne peut être délié des « obligations officielles » de leurs agresseurs.
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