Félix Tshisekedi envoie un signal similaire à celui de son prédécesseur Mobutu il y a 40 ans à l’AIPAC et au lobby américain israélien. Dans les années 1980, l’AIPAC avait discrètement tenté de faire du lobbying en faveur de Mobutu. Est-ce que le cheval de bataille pro-israélien fera la même chose pour Félix Tshisekedi aujourd’hui ?
Dans son livre « Du Congo au Capitol », Stephen R. WEISSMAN a raconté comment l’AIPAC a exercé une pression sur le gouvernement américain dans les années 1980 afin de diminuer la pression qu’il exerçait sur Mobutu Sese Seko, le dirigeant du Zaïre qui a été renommé plus tard République démocratique du Congo.
1982, Mobutu et sa carte israélienne
De 1979 à 1991, Weissman a travaillé comme cadre pour la sous-commission sur l’Afrique de la Chambre des représentants des États-Unis. Son livre décrit avec des détails fascinants comment lui et d’autres se sont battus durement pour réduire l’aide militaire américaine à Mobutu, arguant (à juste titre) qu’en plus d’être répressif, le dictateur ne représentait pas la « stabilité », mais avait perdu en popularité et susceptible d’être renversé.
En 1981, Mobutu, rusé comme toujours, avait répondu aux menaces de réduction de l’aide américaine en brandissant la carte d’Israël . . . reconnaître Israël. A l’époque, Le Zaïre/Congo, comme la plupart des pays africains, avait rompu ses relations diplomatiques avec Israël pendant la guerre du Kippour en 1973.
La guerre d’Octobre 1973 peut être considérée comme la ligne de discorde dans les relations afro-israéliennes, puisque c’est à la suite de ce conflit que nombre de pays africains décidèrent de rompre les relations diplomatiques avec Israël. Un mouvement à sens unique enclenché par les dirigeants africains de l’époque. Certes, une dynamique collective puisque les pays d’Afrique se succédèrent sur cette voie, mais chacun agissant à sa façon.
Mobutu avait rétabli Israël et a bénéficié de l’appui du puissant lobby israélien AIPAC
En 1982, Mobutu a renoué les relations diplomatiques entre le Zaïre et Israël, malgré les réticences des autres présidents africains.
En échange, l’AIPAC a fait du lobbying auprès des membres du Congrès pour obtenir une aide militaire pour le Zaïre. D’autres pays africains ont suivi le Zaïre en rétablissant leurs relations avec Tel Aviv dans les années suivantes. Le Libéria en 1983, la Côte d’Ivoire et le Cameroun en 1986, et le Togo en 1987.
L’AIPAC est un groupe pro-israélien influent avec des membres et des contacts dans chaque circonscription du Congrès. Ils sont également des donateurs importants pour les campagnes politiques.
La « carte de Jérusalem » de Tshisekedi contre Katumbi, « point faible de Benjamin Netanyahu »
En 2020, l’AIPAC a invité Félix Tshisekedi après les élections controversées de 2018 mais reconnu comme président de la RDC, à prendre la parole à sa conférence annuelle. Tshisekedi s’est rendu jusqu’à Washington pour prononcer un discours de 9 minutes, au cours duquel il a promis d’envoyer un ambassadeur congolais en Israël après 20 ans d’absence et de renforcer les liens.
Tshisekedi envoie à l’AIPAC et au lobby américain israélien le même signale que Mobutu il y a 40 ans
En décembre prochain, Félix Tshisekedi devra faire face à un énorme défi lors des élections prévues. Des candidats populaires font campagne contre lui et il répond déjà à la menace en arrêtant ses opposants, y compris un journaliste respecté et éminent nommé Stanis Bujakera.
En juillet, un ancien ministre du gouvernement, Cherubin Okende, a été assassiné de manière mystérieuse. Weissman, qui a maintenu son intérêt pour le Congo, vient de publier un article précieux dans Foreign Policy avertissant les États-Unis de ne pas ignorer une autre « élection volée ».
Il semble que Tshisekedi joue à nouveau la carte d’Israël.
Il a récemment rencontré Benjamin Netanyahu à New York lors de l’Assemblée générale de l’ONU et il a été annoncé le 22 septembre que la RD Congo déplacerait son ambassade en Israël de Tel-Aviv à Jérusalem. Tshisekedi envoie donc le même signal à l’AIPAC et au lobby américain israélien que son prédécesseur Mobutu il y a 40 ans. Nous verrons comment ils réagissent.
Coco Kabwika