Lobbying diplomatique FCC : Kabila projette la perspective d’une instabilité aux conséquences incalculables

République Démocratique du Congo - Parti populaire pour la reconstruction et la démocratie

Pendant que Tshisekedi consulte, Kabila, lui, s’active sur le front diplomatique. Depuis plusieurs semaines, en effet, l’ancien président congolais a initié une intense campagne auprès de plusieurs représentations diplomatiques en RDC, chez les parrains de l’accord de coalition qui le lie à Tshisekedi, mais aussi auprès de la Monusco. Non seulement qu’il accuse son successeur de ne pas respecter les clauses de l’accord de coalition qui les lie, Joseph Kabila et son FCC promettent le pire si jamais leurs revendications ne sont pas prises en compte par le chef de l’État. Plus fort, critiquant la « transformation du cabinet du président de la République en un gouvernement parallèle », Kabila accuse Tshisekedi de vouloir « écarter » le FCC du « jeu politique ». En termes diplomatiques, c’est tout dire. Une menace à peine voilée, mais que Tshisekedi devra prendre très au sérieux. Sinon, c’est son avenir politique qui est mis en danger.

Le président de la République, Félix Tshisekedi et son prédécesseur, Joseph Kabila, se sont transportés sur un autre terrain pour mener leur guerre d’hégémonie et de leadership. Après des provocations internes par acolytes interposés, le combat entre ses deux alliés de la coalition FCC-CACH se mène désormais sur le front diplomatique.

En effet, dans une correspondance très musclée adressée à quelques chefs d’État et aux diplomates, l’ancien président et « autorité morale » du Front commun pour le Congo (FCC), Joseph Kabila Kabange, accuse le chef de l’État de vouloir « écarter » le FCC du « jeu politique ».

Selon les informations glanées par Jeune Afrique magazine, depuis le lancement des consultations, Joseph Kabila a remis en personne une lettre aux ambassadeurs de l’Afrique du Sud, du Kenya et de l’Égypte, adressée aux présidents  garants  de l’accord  de coalition, ainsi qu’à Leila Zerrougui, cheffe de la Monusco et représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies en RDC, qui devait  transmettre  le  courrier  à Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU.

À  Kinshasa,  Joseph Kabila  a, selon la même source, demandé à son  ancien ministre  des Affaires étrangères, le  sénateur  Léonard She  Okitundu,  de  remettre  cette lettre  aux  ambassadeurs  de  plusieurs pays de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC), dont l’Angola, le Zimbabwe, la Zambie, la Namibie et la Tanzanie ainsi qu’au nonce apostolique.

Pour ceux qui savent mesurer la  teneur  d’une  telle  correspondance diplomatique, la démarche de Kabila  n’est  pas moins  qu’un procès fait aux consultations initiées  par Félix Tshisekedi en  vue de former sa future « Union sacrée de la nation ». Le message est clair : c’est  toute  une  déclaration  de guerre qui ne dit pas son nom.

Une intention malsaine

À lire entre les lignes cette correspondance,  dont  une  copie  est parvenue au magazine Jeune Afrique, Joseph Kabila prend la communauté internationale à  témoin et prévient qu’en cas d’instabilité – ce qu’il prédit indirectement – il n’y sera pour rien.

« Mon intention, à ce stade, est d’informer [sur] cette déplorable situation », dit-il, priant ses interlocuteurs «  de  prendre  action dans le sens [qu’ils jugeront] approprié  en  vue  de  nous  aider  à parvenir à un fonctionnement des institutions conforme à la Constitution et à l’accord de coalition. Ce qui éviterait à notre pays la perspective d’une instabilité aux conséquences incalculables».

Visiblement, c’est un Kabila très furieux,  prêt  à  toute éventualité, quoiqu’il  arrive  et  quoiqu’il  en coûte. Sinon, pourquoi prendrait-il le loisir de s’adresser à tous ces diplomates ? Ce n’est pas pour le plaisir  de  s’exercer  en  écriture.

Loin s’en faut. D’ailleurs, la conclusion  de  sa  correspondance  est claire, lorsqu’il évoque sans ambages les  derniers  rendez-vous infructueux avec Félix Tshisekedi et l’échec des négociations du comité de suivi.

Jeune Afrique précise que l’ancien président reconnaît aussi avoir sollicité plusieurs diplomates. « Les ambassadeurs  représentant les chefs d’État témoins de l’accord de coalition (Afrique du Sud, Égypte et Kenya)  ainsi  que la  représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies, cheffe de la Monusco  [Leïla  Zerrougui],  ont été  pleinement  tenus  au  courant de  cette  situation. À  ce jour, ils n’ont pas réussi à faire revenir le président de la République sur la voie du respect de la Constitution, ainsi  que  des  règles  et  principes convenus dans l’accord  de coalition », a-t-il écrit.

… Et le peuple dans tout ça ?

Dans l’arène de cette nouvelle guerre diplomatique, si les acteurs politiques – en l’occurrence le FCC de Joseph Kabila – veulent en découdre avec son « frère-ennemi », le CACH, ce sera sans compter avec la volonté du peuple qui, pour rien au monde, n’est plus prêt à cautionner un coup de force, d’où qu’il vienne.

Si le pouvoir de Kabila, qui émane d’un lointain coup de force de l’AFDL (Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo)  de  1997,  ceux  qui, aujourd’hui au sein du FCC, sont encore  hantés  par  une  réminiscence de mauvais goût, se tromperaient  d’époque.  Les temps sont révolus et les circonstances ne s’y prêtent pas.

LP

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