Comme dans une classe de maternelle, le maître a levé la main plus haut que d’habitude lundi dernier pour dire : c’est assez ! Maintenant, tout le monde observe si le calme va revenir ou s’il va falloir aller plus loin, jusqu’à la déchéance de quelques têtes brûlées.
Parlons vrai. Depuis quelque temps, le gouvernement de la République avait cessé de fonctionner comme un ensemble cohérent, tourné vers un objectif commun : le bien-être collectif. Trop de petits roitelets levaient leurs armées pour écrire une histoire personnelle. A chaque réveil, un arrêté par-ci, un arrêté par-là, et rarement, l’équipe dans son ensemble savait à peine de quoi il s’agissait.
Dans toutes ces démarches individuelles, le souci permanent a toujours été de s’installer et d’installer les siens, mais aussi de capter la lumière des réseaux sociaux, particulièrement de la twittosphère.
Face à ces dérives, le Président de la République a pris le Premier Ministre à témoin et tapé du poing sur la table. La récréation est terminée. A partir de lundi 4 mai, il n’est permis à quiconque de se comporter en électron libre. Ceux qui ont signé des arrêtés en dehors du contexte défini par le Chef du Gouvernement doivent les rapporter illico presto et tout prochain arrêté doit recueillir obligatoirement le quitus du Conseil des Ministres.
Ainsi commence une nouvelle ère. Ainsi débute une nouvelle vie pour nos «Excellences» qui ont perdu beaucoup de temps à courir derrière la satisfaction des egos au lieu de faire preuve d’abnégation au travail.
La Présidence. Après le rappel à l’ordre des membres du Gouvernement, l’opinion attend maintenant le même exercice au niveau de la Présidence. Ici, tout est à refaire car le désordre semble avoir été entretenu sciemment. Le Cabinet ne se réunit pratiquement jamais et les membres sont engagés dans un effroyable trafic d’influence. Chacun y va de sa propre initiative pour construire des relations, décrocher des marchés en utilisant le label Présidence comme un coupe-file.
C’est cette confusion des genres que Justin Bitakwira était allé dénoncer à la 4me Rue, au Parquet Général près la Cour d’Appel de Kinshasa/Matete.
Rappelez-vous. Bitakwira alors ministre du Développement Rural est à la manœuvre au sujet des maisons préfabriquées avec le Libanais Samih Jammel, le même qui va comparaître le 11 mai prochain avec Vital Kamerhe devant le Tribunal de Grande Instance de la Gombe.
Le marché est conclu et signé. Puis arrive Vital Kamerhe. Il remet tout en question, s’empare du dossier et écarte Bitakwira. Un nouveau dossier est monté avec une augmentation exponentielle des prix. Transmis au Budget pour validation, il est recalé. Le ministre du Budget écrit même officiellement pour confirmer le rejet.
Chose étonnante, le dossier rejeté est remis dans le circuit au niveau des Finances où l’ordre de paiement sera même donné ! Une vraie maffia, connue des initiés seuls.
Le cheminement de ce dossier est une meilleure indication du fonctionnement chaotique des services de la Présidence sous Kamerhe. Chacun posait des actes en dehors de toute concertation et à l’insu du voisin, même le plus immédiat. Au point que, en dehors de quelques exceptions, tout le monde fait finalement tout et rien à la fois.
Dans l’exécution des travaux de 100 jours, il a fallu la clameur publique pour alerter le Président sur le désordre entretenu au sein du Cabinet. On se souvient de sa tournée à travers la capitale pour évaluer la construction des sauts-de-moutons et des explications mensongères lui fournies à cette occasion.
Le péché originel de ce Cabinet est d’être dirigé par un ex-adversaire politique. Composé des membres de l’Unc et de l’Udps, ceux-ci ne regardent pas dans la même direction. Les uns travaillent pour la promotion du Dircab tandis que d’autres restent fidèles au Président avec qui ils ont pourtant perdu tout contact, parce qu’il faut passer par le directeur de Cabinet. La situation est terrible, parce que tout ce beau monde fait partie d’un même Cabinet, celui du Chef de l’Etat, où les intérêts ne devraient jamais être contradictoires.
On comprend mieux maintenant pourquoi, en un peu plus d’un an d’existence, la seule vraie réunion du Cabinet est celle qui a été présidée par le Chef de l’Etat lui-même lorsqu’il était descendu au Palais de la Nation pour tirer les oreilles à tout le monde, promettant un coup de balai général si le désordre perdurait.
Malheureusement, rien n’a changé. Éloignés de l’institution Président de la République perchée sur le Mont-Ngaliema, les membres de la Présidence ont trouvé pour principale occupation les marchés publics et le trafic d’influence. Rappelez-vous cette rocambolesque histoire de construction d’un Palais Présidentiel au coût de 180 millions d’euros. Une affaire jamais portée à la connaissance du Chef de l’Etat et qui a provoqué sa colère -terrible selon ses proches- lorsqu’il l’a découverte via les réseaux sociaux.
Plusieurs autres tentatives de même type ont eu lieu et certaines sont malheureusement allées jusqu’à la conclusion comme chacun le découvre dans les dossiers de 100 jours.
L’administration de la Présidence a porté la marque des tricheurs et des affairistes. Des individus qui cachaient ce qu’ils faisaient au Chef de l’Etat et le poignardaient avec sourire dans le dos. C’est cette situation qu’il faut absolument changer pour s’engager sur la voie du redressement.
Le Président a besoin de collaborateurs dignes de confiance, compétents et travailleurs. Des personnes qui n’ont pas leurs propres agendas mais qui travaillent pour la réussite d’une vision unique, celle du Chef de l’Etat.
Nous y reviendrons.
L.P./Le Phare