Pourquoi Dan Gertler transfère-t-il ses actifs pétroliers à de nouvelles firmes ?(AI)

En basculant les blocs 1 et 2 du lac Albert vers deux entités créées en 2018, le diamantaire israélien Dan Gertler tente de contrecarrer les effets des sanctions américaines sur ses sociétés congolaises et d’obtenir une nouvelle extension sur ses permis pétroliers.

Après avoir été placé sous sanction du Department of Justice (DoJ) américain en 2017, le diamantaire Dan Gertler a largement réorganisé ses affaires en RDC, pays dont il tire la plupart de ses revenus miniers. Proche de l’ancien président Joseph Kabila, le fondateur et actionnaire majoritaire des sociétés enregistrées aux îles vierges britanniques Caprikat et Foxwhelp depuis 2010, via lesquelles il contrôle les blocs 1 et 2 du lac Albert, a décidé de transférer ces actifs pétroliers congolais à deux nouvelles sociétés, enregistrées cette fois-ci à Kinshasa en 2018.

Selon nos sources, le gouvernement a reçu fin 2020 via les services du désormais ex-ministre des hydrocarbures Rubens Mikindo une demande de transfert d’actifs aux profits des firmes Wood Haven DRC SASU et Albertine DRC SASU. Ces deux dernières pourraient, en cas d’accord du gouvernement, récupérer les droits et obligations autrefois dévolus à Caprikat et Foxwhelp. En créant ces firmes, Gertler pensait échapper aux effets de certaines sanctions, grâce à la protection de Kabila – au pouvoir jusqu’à la fin 2018 et tout puissant jusqu’à la fin 2020 lorsqu’il contrôlait le parlement, le Sénat et les provinces. Depuis quelques mois, l’union sacrée échafaudée par son successeur à la présidence, Félix Tshisekedi, a considérablement affaibli Kabila.

Premier défi pour le nouveau ministre

L’autre versant du dossier est que Gertler compte utiliser la demande de transfert de titres pétroliers, restée bloquée dans les méandres de l’administration, pour réclamer une nouvelle extension sur ses blocs 1 et 2, arguant d’une force majeure l’ayant empêché de travailler. Nommé le 12 avril par Félix Tshisekedi lors d’un très profond remaniement, le nouveau ministre congolais des hydrocarbures Didier Budimbu sera ainsi très vite testé sur les orientations qu’il compte donner à son portefeuille. La dernière extension accordée à Caprikat et Foxwhelp en juin 2019 arrive à échéance le 16 juin 2021.

Comme nous l’avons révélé (Africa Intelligence du 03/03/21), Gertler a officiellement fait demander, via un courrier daté du 12 février 2021 provenant du directeur général des deux firmes Alain Mukonda Mayandu, un nouveau délai de grâce sous prétexte de cette force majeure. Le document à l’époque ne précisait pas de quel type de force majeure il s’agissait. Tshisekedi et Budimbu – ancien vice-ministre de l’éducation et tout nouveau dans le monde pétrolier – auront ainsi le choix de redonner une nouvelle extension justifiée, du point de vue de l’investisseur, par l’attente liée au changement de noms des sociétés chargées de l’exploration, mais illégale du point de vue du droit congolais.

Les autorités du pays pourront aussi reprendre le permis pour absence de travaux suffisant après onze ans de contrat. Dans ce dernier cas, la RDC pourrait accorder ce bloc en échange d’un bonus de signature, à l’une des sociétés le réclamant depuis plusieurs années. C’est le cas de Total (présent du côté ougandais du lac Albert, où 1,5 milliard de barils récupérables sont en développement) ou encore les Italiens d’ENI, dont le patron Claudio Descalzi a rencontré Tshisekedi lors d’un séjour à Kinshasa en septembre 2020, organisé par son conseiller spécial pour les investissements Jean-Claude Kabongo . Ils pourraient aussi choisir une autre compagnie comme les Sud-Africains de Dig Oil, qui réclament le bloc 1 afin de compenser les 617 millions de dollars de l’arbitrage perdu par la RDC. 

Africa Intelligence

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