RDC: J. Kabila soupçonne Kalev Mutond de négocier un accord de reddition avec François Beya Kasongo (AI)

Kabila

Le maître-espion de Kabila, Kalev Mutond se trouverait toujours à Kinshasa

Le directeur déchu du renseignement congolais s’est évaporé quelques heures avant que la police ne vienne l’arrêter à la mi-mars. La cavale de celui qui détient tous les secrets du régime Kabila alimente toutes les craintes, tant dans le camp du chef de l’Etat Félix Tshisekedi que dans celui de son prédécesseur.

Où se trouve l’ancien tout-puissant administrateur général de l’Agence nationale du renseignement (ANR), Kalev Mutond ? C’est la question qui taraude depuis près d’un mois les services de sécurité tout autant que le pouvoir politique congolais. Tantôt annoncé au Burundi – Kalev Mutond est un familier du président Evariste Ndayishimiye -, tantôt au Zimbabwe, l’ancien sécurocrate de Joseph Kabila serait en réalité toujours en RDC. Selon nos sources, il pourrait même se trouver à Kinshasa, où il dispose de nombreuses résidences, de planques et de fidèles disposés à l’héberger. 

La justice le recherche à la suite de plusieurs plaintes pour des faits « d’arrestations arbitraires, de tortures, de traitement cruel, inhumain et dégradant » ou encore de « tentative d’assassinat ». Les avocats de « Kalev » dénoncent une procédure arbitraire et illégale. Ils ont porté plainte contre les plaignants. Sa subite disparition mi-mars a suscité une vague de paranoïa au sein de la présidence congolaise : signe que l’ancien patron de l’ANR dispose toujours d’un entregent au sein de son ancienne agence, Kalev Mutond a été alerté de l’imminence de son arrestation quelques heures seulement avant le déclenchement de l’opération, alors que seul un cercle très restreint d’agents de l’ANR avait été mis dans la confidence.

Depuis sa cachette, Kalev Mutond – qui change de téléphone très régulièrement pour éviter d’être tracé – a néanmoins discrètement fait passer un message à la présidence congolaise fin mars : il serait prêt à se rendre en échange de l’annulation par le parquet général du mandat d’amener et de recherche dont il est l’objet depuis le 11 mars. Autre condition posée par le militaire originaire du sud de la richissime province minière de Lualaba (ex-Katanga) : la tenue d’un procès public. Des conditions qui sont jusqu’à maintenant restées lettre morte, les autorités congolaises n’étant pas exactement disposées à offrir une tribune à l’ancien maître-espion.

Négociations avec Tshisekedi ?

Même si rien n’est, à ce jour, conclu, la perspective d’un accord entre Kalev Mutond et l’administration de Félix Tshisekedi inquiète particulièrement Joseph Kabila, dont Mutond est un intime. L’ancien président congolais s’est senti directement visé par la procédure ouverte contre l’ancien chef de l’ANR, et craint les conséquences d’un « pacte » entre ce dernier et l’administration Tshisekedi.

Africa Intelligence a pu s’entretenir avec Kalev Mutond, toujours visé par les sanctions américaines et européennes. S’il a déclaré n’avoir, à ce jour, pas ouvert de négociation avec l’entourage de Félix Tshisekedi, il a néanmoins reconnu avoir rencontré le 24 février, en présence de plusieurs témoins, Kitenge Yesu. Figure emblématique du règne du président Mobutu Sese Seko, Kitenge Yesu est très influent auprès de Tshisekedi, qui l’a nommé comme son haut représentant et le consulte sur plusieurs dossiers sensibles.

Durant sa rencontre avec Yesu, Kalev Mutond a plaidé sa cause et rappelé à son interlocuteur qu’il avait étroitement travaillé à la mise en place de la coalition qui associait jusqu’à récemment le Front commun pour le Congo (FCC) de Kabila et le Cap pour le changement (CACH) de Tshisekedi. Le camp Kabila a eu vent de l’entretien entre Yesu et Mutond. 

Joseph Kabila fulmine devant ses proches contre cet acharnement de la part de l’administration Tshisekedi à l’encontre de ses sécurocrates. Il soupçonne toutefois Mutond de négocier un accord de reddition avec le conseiller sécurité du président congolais, François Beya Kasongo. Le prix pourrait être d’obtenir de précieuses informations sur l’ex-chef d’Etat. Du côté de Tshisekedi, les éventuelles confidences de Mutond inquiètent aussi, notamment les secrets qu’il détient sur les conditions de l’alliance avec Kabila nouée durant l’élection présidentielle de décembre 2018. Deux scénarios fermement démentis par Mutond auprès d’Africa Intelligence.

 Africa Intelligence

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