Le Président Tshisekedi a installé dans le cockpit de la présidence des experts du Tony Blair Institute pour élaborer la stratégie économique du pays, notamment le développement du projet Grand Inga.
Avant même d’avoir terminé le casting de l’équipe du nouveau Premier ministre, Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge, le président Félix Tshisekedi a déjà choisi les conseillers qui parleront à son oreille et à celles des futurs ministres. Depuis la fin 2020, une équipe du Tony Blair Institute (TBI) discute à Kinshasa avec les conseillers du Président, la Cellule chargée de l’amélioration du climat des affaires (CCA), les partenaires de développement, le secteur privé et la société civile, de la définition d’un programme économique comportant des indicateurs de performance clairs. La mission pourrait aussi inclure la divulgation de l’utilisation de la technologie digitale pour stimuler le développement dans des domaines-clés comme la santé, l’agriculture et la gouvernance numérique, précise un responsable de TBI.
Pas une première pour Tony Blair
Ce n’est pas la première fois que Tony Blair s’intéresse à l’énergie en Afrique : en 2018, il a conseillé le gouvernement guinéen pour l’obtention de 1,7 milliard de dollars de prêts auprès de l’Eximbank chinoise pour la construction par China International Water & Electric Corporation de deux barrages. Toujours en Guinée, l’ancien Premier ministre britannique a facilité un contrat pour l’exploration d’opportunités dans le domaine des mines entre le gouvernement et un fonds d’investissement moyen-oriental qui l’emploie comme conseiller. Tony Blair ne craint pas non plus de faciliter la pénétration chinoise en Afrique, faisant la promotion des parcs industriels éthiopiens auprès de compagnies textiles de l’Empire du Milieu. Le Rwanda, le Sénégal, la Gambie, le Liberia, le Mozambique et la Côte d’Ivoire ont également bénéficié des conseils de TBI. L’Angola pourrait suivre après l’entretien en novembre 2020, entre le Président João Lourenço et Tony Blair sur les réformes en cours et les possibilités d’investissement dans ce pays.
Selon son staff, le soutien du Tony Blair Institute ne coûtera pas un penny à l’État congolais. Le TBI se définit comme une organisation non lucrative qui offre aux dirigeants africains du conseil stratégique et des soutiens pratiques pour les aider à mettre en œuvre des réformes. Quand on demande d’où vient l’argent pour payer ses consultants, l’Institut répond avoir développé des partenariats avec les fondations Rockfeller, UBS Optimus (Union de Banques Suisses), Bill et Melinda Gates, Microsoft et l’US AID, en toute « philanthropie ». Selon le magazine Africa Report, Tony Blair affirme passer les deux tiers de son temps à travailler pour des ONG caritatives et le reste à gagner l’argent pour les soutenir. Citant des insiders de la galaxie blairiste, Africa Report évoque cependant une « ambiguïté délibérée » entre consultances et œuvre bénévole.
Une lacune apparaît dans ce conte de fées narré par les communicants de TBI: celle de la liaison dangereuse entre Tony Blair et le président autocrate du Kazakhstan, Noursoultan Nazarbaïev dont le premier a chanté les louanges pendant cinq ans moyennant des millions de livres sterling, malgré le massacre en 2011 par la police de 15 personnes qui manifestaient en faveur des travailleurs du pétrole. Tony Blair recommandera-t-il cette fois la bienveillance envers les Congolais qui contesteraient les projets gouvernementaux ?
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