La ministre de l’environnement Eve Bazaiba entend faire le ménage parmi les propriétaires des grandes exploitations forestières du pays. Une douzaine de sociétés – chinoises, congolaises et européennes – enfreignent la majorité des réglementations en vigueur.
Kinshasa prend toutefois son temps avant de résilier les titres appartenant à des acteurs aux puissants relais politiques, quitte à froisser certains de ses partenaires internationaux.
Ce travail minutieux, étalé sur près de deux ans, de mars 2021 à février 2023, offre une plongée saisissante dans le lacis d’un secteur particulièrement rentable .
Parmi ses acteurs clefs a longtemps figuré la famille du général congolais Gabriel Amisi, aussi connu sous son sobriquet de « Tango Four », et qui s’est constitué au cours des années un véritable empire forestier.
Les sanctions américaines et européennes, qui le visent depuis 2016 pour son rôle dans des violations des droits humains, l’ont toutefois conduit à prendre du large avec ses affaires dans la filière du bois.
Sept des titres forestiers détenus par sa société Maniema Union ont été revendus en 2019 à des entités figurant dans le viseur de l’audit et possédée par des ressortissants chinois : cinq à Congo King Baisheng Forestry Development (Cokibafode, 792 000 ha), dirigé par Xu Mingfu, et deux à Congo Sunflower (598 000 ha), piloté par Yao Fanqin et Lu Yunying.
Ce transfert ne serait pourtant que de façade, selon des enquêtes de terrain menées par des ONG. En sous-main, la famille de Tango Four continue de tirer les ficelles, tandis que les cadres chinois s’occupent de la commercialisation du bois, essentiellement vers l’Asie.
L’audit met également en exergue les manquements d’Industrie forestière du Congo (IFCO), une société de plus de 800 salariés, qui n’est pas à jour de ses taxes de superficie sur une concession de plus de 275 000 ha dans la province de la Tshuapa.
Anciennement dénommée Trans-M, puis Cotrefor, elle est, selon une source au sein de l’administration des forêts, toujours contrôlée par le Libanais Ahmed Tajeddine. Ce dernier est l’ancien patron du groupe Congo Futur, placé sous sanctions du Trésor américain en 2010 en raison de sa proximité présumée avec le Hezbollah. Son associé Rachid el-Chaer serait également au capital d’IFCO.
Faisant désormais profil bas du fait des sanctions américaines, les deux hommes ont confié la gestion quotidienne de leur société au Congolais Mingas Nzinga.
Extrait de l’article d’Africa Intelligence