Le président de la République a signé, le vendredi 17 juillet 2020, une série d’ordonnances, consacrant de nouvelles mises en place au sein des Forces armées de la RDC (FARDC). Très vite, la décision a été saluée – notamment par les USA – comme un acte de courage et d’avancée démocratique. Sur le plan politique, Félix Tshisekedi a arraché aux alliés (FCC) le commandement des troupes dont leurs pions détenaient encore les leviers. Même s’il a rassuré dernièrement lors de son séjour à Brazzaville, le maintien de la coalition FCC-CACH, le chef de l’État sait user à la fois du bâton et de la carotte. En stratège, il y va de manière intelligente. C’est donc un homme de paix qui ne veut pas casser la baraque.
Il a pris tout son temps et, quand a sonné l’heure, il a agi. En effet, une année et demie après son accession au pouvoir à la suite des élections du 30 décembre 2018, le chef de l’État, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, vient de donner suffisamment de gages de son autorité, en se distançant de son prédécesseur.
Des signaux sont forts. De plus en plus, le nouveau maître de Kinshasa s’assume, en démontrant à tous ceux qui ne lui donnaient aucune chance, vu sa marge de manœuvre réduite, avec notamment une Assemblée nationale majoritairement FCC (341 sièges sur 500), qu’il engage effectivement le pays sur la route de l’alternance et qu’il n’est pas qu’une marionnette entre les mains du « clan Kabila ».
Pour ce faire, il fallait poser des préalables. La refondation du pays sur de nouvelles bases, notamment avec une justice qui renait de ses cendres pour imposer la vision de l’État de droit, est la preuve irréfutable. Et surtout que dans les nouvelles initiatives prises sous l’impulsion du chef de l’État, l’inquiétude, mieux, l’agitation, est palpable dans le camp du Front commun pour le Congo (FCC).
Une main de fer dans un gant de velours
C’est pour dire que Tshisekedi fait désormais peur. Le fils du Sphinx de Limete qu’on croyait tomber dans le tâtonnement pour son quinquennat à la magistrature suprême, semble bien circonscrire son action. Il n’y va pas à tâtons. Calmement mais sûrement, il étend son champ d’autorité, en reprenant avec tact et diplomatie ce que Kabila et ses acolytes contrôlaient, il y a peu. Les coups qu’il administre font très mal à ses adversaires-coalisés, comme le ferait celui donné par « une main de fer dans un gant de velours ».
Les nominations et permutations au sein des Forces armées de la République démocratique du Congo s’inscrivent dans cette logique. La RDC qui est confrontée à des défis sécuritaires énormes, avec notamment la multiplicité des groupes armés et la présence illégale des troupes étrangères sur son sol, a besoin non seulement d’une armée disciplinée, apolitique et engagée pour défendre son intégrité territoriale, mais aussi d’une confiance absolue au sein de l’unité de commandement, avec à sa tête le commandant suprême, le président de la République.
C’est ici que Félix Tshisekedi joue et gagne dans une partie de jeu complexe, le jeu du contrôle de la défense et de la sécurité. Il est appelé à monter sa stratégie de défense de la République avec les mêmes hommes d’hier, tout en jouant sur le fondamental qui est la conscience patriotique et le changement des mentalités. Si hier bien des observateurs ont indiqué – avec raison d’ailleurs – que Félix Tshisekedi jouait sur un terrain miné, parce que se trouvant au milieu des chefs militaires nommés par Kabila, aujourd’hui la situation évolue.
Loin d’être incompétent ou encore peureux, le nouveau chef de l’État est parvenu à faire des remplacements sans drame, en manœuvrant habilement dans un contexte où certains hauts gradés sous Kabila avaient conquis leur position actuelle par la guerre. Et ces genres d’officiers, Tshisekedi l’a si bien compris, conservent ainsi dans une certaine mesure leur capacité d’alimenter l’insécurité.
Bref, au vu de ces nominations qui ressemblent à un véritable coup de balai dans la cour, le président de la République a envoyé une réponse sage à ceux qui le prenaient pour un figurant devant son prédécesseur et actuel allié, Joseph Kabila. Par ce geste que d’aucuns qualifient de « courageux », Tshisekedi a montré à la face du monde qu’il n’est ni peureux, ni incompétent, mais plutôt diplomate et stratège prudent. «L’homme prudent voit le mal et se cache, mais les simples avancent et sont punis », enseigne la sagesse du roi Salomon.
Qui sont les nouveaux promus au sein de l’armée ?
-L’inspection générale de l’armée est désormais dirigée par le Général d’armée Amisi Kumba Gabriel, en remplacement du Général John Numbi.
-Le Général Major Buamunda Tunda Franck est nommé chef de la maison militaire du chef de l’État.
-Le Lieutenant Général major Matutezulua André est quant à lui nommé chancelier des ordres nationaux.
-Le Général Fall Sikabue est le nouveau chef d’Etat-major général des Forces terrestres.
-Le Général Léon-Richard Kasonga est maintenu comme responsable de la communication des FARDC.
Les autres responsables nommés
– Généraux Muhindo Akili Charles et Kasereka Sindani Étienne : inspecteurs généraux adjoints de l’armée;
– Kahungu Yankole Isidore : secrétaire général à la Défense;
-Lieutenant général Yav Kabey Jean – Claude : remplace le général Gabriel Amisi au poste de chef d’Etat – major général adjoint en charge des opérations et renseignements;
-Lieutenant général Wabasira Obed : sous-chef d’Etat – major en charge des opérations;
-Général Mandiangu Mbala Michel : remplace le Delphin Kahimbi (décédé) au poste de sous – Chef d’Etat – major en charge des renseignements;
-Vice-amiral Jean – Marie Valentin Matalinguma : chef d’Etat-major de la Force navale;
-Général Diasuka René : chef d’Etat-major de la force aérienne;
Général Sukabwe Asinda Fall : chef d’état-major de la Force terrestre;
-Général Luboya Nkanshama Johny : commandant de la première zone de défense;
Généraux Mao Christian Ndaywel et Dieudonné Kyamasa : adjoints;
Général Mpunza Ngoma : chef d’Etat- major de la zone de défense;
-Général Pacifique Masunzu : commandant de la deuxième zone de défense;
Généraux Ishalingonza Nduru Jacques et Freddy Kalume : adjoints;
Général Kaheraya Marcel : chef d’État- major.
Général Yav Irung Philémon : commandant de la troisième zone de défense des FARDC;
-Général-major Léon Richard Kasonga Tshibangu : maintenu commandant du service de communication et porte-parole des FARDC;
Général Ekenge Sylvain : adjoint en charge des OPS et Renseignements;
-Colonel Jean – Daniel Batabanza : Administration ;
-Général Albert Massy Bamba : commandant du corps chargé de la sécurisation des parcs nationaux et réserves apparentées;
-Général Kitenge Amisi : adjoint en charge des OPS et renseignements;
-Kisuki Benoît (civil) : en charge de l’administration.
-Général Ngoy Kazimoto Juvénal : commandant de la « Base logistique centrale » de l’armée;
-Général Muyunyi Malele Maxyme : commandant de la base aérienne des FARDC;
-Contre-amiral Ruvunangiza BM : commandant de la base logistique navale.
LP