Kolongele Eberande expose-i-il Fatshi à la critique populaire ?

Professeur Eberand Kolongele

POLEMIQUE AUTOUR DE LA MISE EN PLACE ET AFFECTATION DES SG DE L’ADMINISTRATION PUBLIQUE

Toutefois, des sources renseignent que malgré la « controverse », les SG repris sur l’arrêté de la ministre de la Fonction publique, auraient reçu leurs notifications depuis hier mardi.

L’arrêté n°009/MIN.FP/YEB/2020 du 16 avril 2020 portant mise ne place des Secrétaires généraux de l’Administration publique en RD Congo produit déjà ses effets. Selon une information parvenue à la rédaction de « Forum des As », les Cinquante-huit nouveaux Secrétaires généraux concernés par l’arrêté susmentionné, auraient officiellement été notifiés depuis hier mardi 28 avril. Ce, malgré le « veto » de Désiré-Cachemire Kolongele Eberande, directeur de cabinet adjoint de Félix Tshisekedi.

Loin d’être un scoop du journal, dans une correspondance adressée à la ministre de la Fonction publique, Yolande Ebongo Esongo, le dircaba du Chef de l’Etat a demandé à cette dernière de rapporter sa décision. A l’ère de Nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), qui fait perdre aux médias classiques leur monopole traditionnel d’informer la masse, cette lettre du cabinet de Fatshi se trouve très largement partagée via les réseaux sociaux. Depuis, une vive polémique sans cesse ni fin, provoque un véritable séisme chez les internautes congolais d’ici et d’ailleurs.

La question est celle de savoir si un proche-collaborateur du Président de la république, fut-il le directeur de cabinet, est investi de plein pouvoir de prendre une décision sur un membre du Gouvernement. Si oui, quelle est la disposition de la Constitution qui lui confère explicitement cette prérogative ? Il semble que la Loi des lois du 18 février 2006, en vigueur en République démocratique du Congo, est claire à ce sujet. En tout cas, dans l’ordre institutionnel, on ne voit nulle part apparaitre le cabinet du Chef de l’Etat. Les 229 articles composant ladite constitution sont sans équivoque.

UN IMPAIR CONSTITUTIONNEL?

A la lumière des arguments avancés par les uns et par les autres sur les réseaux sociaux, il appert que la polémique autour de la correspondance du dircaba de Félix Tshisekedi, procède plus de l’émotion que de la raison. Selon que l’on soit du même bord politique que le Chef de l’Etat, l’acte du numéro 2 de l’administration du cabinet Fatshi, n’appelle aucune objection. Un raccourcis que rejette nombre d’observateurs qui renvoient leurs co-débatteurs soit directs, soit en ligne, aux prescrits de la Constitution.

Dans leur argumentaire, ces analystes brandissent l’article 93 de la Constitution qui stipule :  » Le ministre est responsable de son département. Il applique le Programme gouvernemental dans son ministère, sous la direction et la coordination du Premier ministre. Il statue par voie d’arrêté « .

Etant donné l’exigence d’une lecture combinée des articles de la Loi fondamentale, les mêmes commentateurs brandissent, par ailleurs, une autre disposition de la Constitution, à savoir l’article 91 qui dispose que  » le Gouvernement définit, en concertation avec le Président de la république, la politique de la Nation et en assure la responsabilité « .

Dès lors, il apparait clairement que le Premier ministre, chef du Gouvernement, est le responsable de l’action de ce dernier. C’est ici que les hérauts de la Science politique soulignent que, dans tout régime semi-présidentiel, comme c’est le cas actuel en RD Congo, le Premier ministre répond de l’action de l’Exécutif devant le Parlement. A la suite de cette prérogative constitutionnelle du Premier ministre, les mêmes observateurs en viennent à déduire qu’il n’appartient pas au Président de la république, d’adresser directement un courrier à un ministre.

La gestion du pays reposant sur une approche systémique sur fond de séparation nette des pouvoirs, l’ordre naturel des choses admet que le Chef de l’Etat saisit directement le Premier ministre, lorsqu’il constate un faux-pas dans l’agir d’un membre de l’Exécutif. Et, c’est le Premier ministre, en sa qualité de chef du Gouvernement, qui devra soit interpeller, soit sanctionner de quelque manière, le ministre concerné. Encore que, pour toute action ou décision, un membre du Gouvernement a l’obligation d’en informer, au préalable la hiérarchie pour ultime avis. Et, d’aucuns supposent que l' »arrêté-martyr » de la ministre de la Fonction publique n’a pas échappé à ce principe élémentaire, b-a ba de la gestion. Dans le jargon du Management moderne, on parle de la « validation administrative ».

A partir du moment où le Premier ministre est responsable de l’action du Gouvernement devant le Parlement, plus exactement l’Assemblée nationale, on ne voit pas comment un directeur de cabinet du Président de la république peut directement saisir un ministre. Dans l’opinion, cet acte donne l’impression que le Chef de l’Etat est en même temps Premier ministre et, de ce fait, responsable de la gestion quotidienne du pays devant les élus directs du souverain primaire. Assemblée nationale, Pourtant !

Le courrier du dircaba de Fatshi à Yolande Ebengo, serait-il ce fameux bois tordu qui fait le droit ? Il semble que non. En tout cas, nombre d’observateurs considèrent cet acte comme un impair constitutionnel de nature à exposer le Chef de l’Etat à la critique générale d’une opinion avisée. En français facile, Désiré Cachemire Kolongele Eberande n’aurait pas dû prendre sa plume, pour écrire à la ministre de la Fonction publique, faute de qualité. 

Grevisse KABREL/Forum des As

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