Souvent présenté comme un « pays à problèmes », le Congo demeure un « pays solution ».
Quelle que soit la frontière vers laquelle on se tourne, le Congo, trop vaste, trop riche, trop mal défendu, a des raisons de se plaindre de ses voisins : à l’est surtout, chacun laisse ses groupes armés, ses opposants, ses trafiquants opérer librement, sans trop se soucier de les empêcher de nuire. Qu’il s’agisse du pétrole exploité par l’Angola dans des eaux territoriales congolaises ou aspiré depuis les rives ougandaises du lac Albert, du gaz extrait du lac Kivu depuis le Rwanda, des Peuls en quête de pâturages et franchissant les frontières du nord, une grande partie des ressources du Congo est aspirée par les voisins de la région tandis qu’au Nord et au Sud-Kivu, on dénombre plus de 120 groupes armés. Vivant aux dépens des populations locales, ils expédient le produit de leurs rapines vers les voisins qui les blanchissent, les raffinent et finalement les exportent au bénéfice de leur balance commerciale… Si l’Etat congolais avait vocation à être une puissance régionale, son affaiblissement, depuis la fin du siècle dernier, a ouvert la voie à tous les appétits, qu’il s’agisse d’intervenants lointains comme la Chine ou de voisins proches d’abord soucieux de leur propre développement…
Souvent présenté comme un « pays à problèmes », voire comme l’enfant malade de l’Afrique, le Congo demeure un « pays solution » : à terme, ses ressources minières – qui pourraient être épuisées d’ici trente ans – sont moins importantes que les puits de carbone que représentent ses tourbières, que les terres cultivables, que les eaux généreuses nées de deux saisons des pluies. De par le monde, nombreux sont ceux qui sont conscients des ressources de cette « dernière réserve » de la planète, mais nombreux aussi sont les prédateurs qui veulent en tirer un profit immédiat : dans les régions minières, la pollution est un scandale, dans les villes, les déchets plastiques bloquent le cours des eaux et dans l’est, l’insécurité jette femmes et enfants sur les routes… Les voisins prédateurs ne sont cependant pas responsables de tout, pas plus que la mondialisation avide : les Congolais aussi vivent « au taux du jour », c’est-à-dire sans se soucier du lendemain ! Ils mettent en vente les ressources pétrolières, minières et forestières, tolèrent des politiciens irresponsables qui leur distribuent des miettes, oublient que le résultat des élections n’a jamais été communiqué, surchargent les bateaux et les avions et s’étonnent du taux de naufrages…
Pays à problèmes ? Pays solution ? Le Congo est tout cela à la fois. Il pourrait encore se sauver et contribuer à l’avenir de l’humanité à condition que, dans un sursaut de courage et de dignité, ses citoyens se décident à compter d’abord sur eux-mêmes…
Le Soir